Cultiver sa créativité #1 : l’art de l’autoportrait.

Bon. J’avais écris tout un article archi-long sur comment développer sa créativité au quotidien, mais il n’était qu’un listing plat, sans véritable saveur, de choses que je fais à titre personnel mais qui ne donne pas véritablement de conseils pour développer son esprit créatif. Ca m’a un peu démotivée, entre le temps passé dessus, et l’impression de tourner en rond, d’être une sorte de page un peu nullarde similaire à ces sites qui se ressemblent tous parce qu’ils se copient-collent entre eux il faut croire. Non pas que l’idée de l’article est jetée, parce que je vais plutôt opter pour une exploitation fragmentaire du sujet par pratique.

Je me suis demandée ce que j’avais fais de vraiment créatif. Mais déjà, partir à la base : c’est quoi, la créativité ? La définition proposée par notre ami CNRTL est celle-ci : « Capacité, pouvoir qu’a un individu de créer, c’est-à-dire d’imaginer et de réaliser quelque chose de nouveau. »
Finalement c’est une définition que chacun.e s’approprie, parce que deux dessins sur une même thématique sont créatifs dans le sens où ils sont la nouveauté d’une série de dessins. Aka l’Inktober, ou tout challenge. (on est en mai, y’a le Mermay, voilà ça change) Pour autant , de moi à moi, j’estime faire quelque chose de créatif quand je sors un peu de ma zone de confort pour explorer de nouvelles choses.

Donc la question suivante, pleine de logique a été : est-ce que depuis le début du confinement (parce que cf l’article de pression confinée où j’ai senti le besoin de le rendre productif), j’ai fais quelque chose qui change particulièrement de mes dessins habituels ? Hé bien, en un sens pas trop, parce qu’il s’agit simplement d’un portrait – technique que je commence à maîtriser, je dirais ; mais c’est tout de suite plus compliqué quand on cherche à se dessiner soi. C’est déjà l’aspect qui change, mais l’intérêt de cet article va être de discuter pourquoi s’essayer à l’autoportrait, et de quelles manières – même si ce n’était que mon premier essai et que je n’ai absolument pas la prétention de savoir comment rendre ça absolument créatif mais vous allez voir qu’on peut développer pleins d’idées facilement pour rendre ce travail intéressant. Mais déjà :

Pourquoi s’essayer à l’autoportrait ? 


Fût un temps, je m’étais dis que faire un autoportrait avec les outils que j’utilise (donc le crayon quasi exclusivement pour le portrait – pour l’instant ? ) serait pour moi comme une sorte de preuve, bien entendu s’il était réussi, que j’avais acquis une certaine technique. En effet, je me disais qu’il faudrait passer au-delà des a priori de mon image, de mon propre jugement de mon physique, en me concentrant seulement sur l’aspect technique. Ne pas me laisser troubler par ce que je peux éprouver face à mon propre rapport, comme par peut-être des éléments d’un physique qui peuvent me rappeler des connaissances personnelles, des choses qui m’ont marquée comme des regards plus ou moins difficiles ou porteurs d’histoires. C’était, déjà pour moi, un exercice pour me détacher un peu du trop subjectif donc et avoir une sensibilité – peut-être un peu moindre par moment, même si ça restait variable – autre, sur le plaisir même que peut procurer le savoir faire.
Il y avait un peu du challenge personnel aussi de sortir de se zone de confort pour essayer de travailler son image de soi : pourquoi est-ce que comme beaucoup je suis si dure envers moi-même ? Peut-être qu’utiliser mon visage comme objet d’étude pouvait être un moyen de passer du temps avec mon apparence, de me familiariser un peu mieux avec, de peut-être à force de coups de crayons, l’apprécier, je n’en savais rien.

Animated self-portrait 2016, Carliihde, source deviantart

Mais il y avait un questionnement plus profond en réalité. Il était, finalement, une version un peu plus précise du point précédent : quelle image de nous avons-nous exactement ?
Faire un autoportrait pour la technique n’est clairement pas la fin qui me motivait, je n’avais qu’à me faire une sorte d’entraînement intense de portraits, je l’aurais travaillé cet aspect-là. Utiliser ce biais comme outil de développement personnel, oui, pourquoi pas, mais j’avais aussi conscience que c’est conflictuel de consacrer des heures à son faciès.
A quoi ça me sert de dessiner ma trogne, je ne vais pas l’encadrer quand même. (mais je pourrais dire « de quoi, tu veux mon portrait ? » et tendre allègrement mon dessin à présent ? Haha.. Haha… Hahaha… l’humour est confiné lui aussi déso) Non, ce qui en réalité m’intéressait particulièrement, c’est de travailler sur la vision qu’on a de nous. Ok, on se trouve moche, mais pourquoi ? Ce nez ? Ce regard ? Ce ceci, ce cela ? Mais encore ? Bah ok, dessine le, met le en exergue, joues enn lui qui te torture au quotidien. Quoi, ce sera moche ? Bah… Ce n’est pas ce que tu dis déjà de toi en te regardant ? Alors peut-être autant se donner une raison si tu te fais un œil de cyclope, des lèvres miniatures, que tu te caricatures, je n’en sais rien.
Mon image est instable. Parfois elle me malmène, et d’autres jours elle me laisse tranquille au sens où elle ne se rappelle pas à l’ordre et on cohabite, point barre. Même que parfois, si si ça arrive, on sympathise. « Tiens, je me sens bien dans ma peau là », « je trouve que ça me va bien ça », « ça me fait plaisir de me voir sourire », « j’adore la couleur de mes yeux », « c’est cool de reprendre un peu de poids contrairement à ce que je pensais hier, je porte mieux mes vêtements au lieu de flotter dedans ». Même si des adjectifs faciles reviennent, j’essaie de ne pas être trop dure et de me dire que bah, « ça va », ni laid ni beau ce visage. Un visage, point. Qu’est-ce que je m’en tape, en théorie, du reste. Mais malgré ça je ne me vois jamais pareil. Et quand j’écris ça, je n’entends pas particulièrement un élément physique qui me titille plus qu’un autre, j’entends que
je me vois au travers d’une émotion,
je trouve qu’aujourd’hui j’ai une aura de telle couleur,
je ne saurais dire pourquoi mais en me volant un regard dans le miroir j’ai eu cette chanson dans la tête,
et toujours je me vois à travers des bouts de mon histoire,
de ma personnalité,
de ma construction.

C’est ça, qui m’intéresse. Les visions qu’on a de nous-même. Arrêtez de penser pas plus loin que « je me trouve moche », « je me trouve passable », « je me trouve joli.e », vous êtes tellement plus, aussi bateau que sonne cette phrase, elle est vraie.
Un visage dit tellement, tellement de choses. Mais quand on croit le contrôler, sauf avec une grande maîtrise qui amène un recul, y’a toujours des éléments qui nous trahissent et c’est pour ça que j’adore travailler le portrait, pour capter l’individualité, les individualités d’une même personne. Parce que oui, on dégage vraiment kyrielle de fragments de nous.


Ou la chanson qui a fini de me convaincre de faire cet autoportrait y’a de ça un moment.
Et enjoy cette voix qui fait fondre. ♥

Kintsukuroi


Ca, c’est un mot qui me suit depuis un sacré bout de temps. Le premier qui a lancé une addiction pour ces mots qui n’existent que dans une langue, qui n’ont pas d’équivalents propres. Des mots uniques, qui tiennent tous seuls, dont aucun autre semblable n’a pu voler la même définition. Des mots venus d’ici et d’ailleurs.
Kintsukuroi désigne une méthode de réparation japonaise, le plus souvent exercée sur céramique ou porcelaine, au moyen d’une laque qui est ensuite saupoudrée d’or.
Ce n’est pas tout à fait comme je me vois. C’est un bout correspondant sans doute à l’image centrale que j’ai de moi, avec un autre bout que j’aimerais atteindre.
Je me vois toute cassée, en morceaux éparpillés depuis des années – et souvent toute moche toute triste suite à ça – mais j’aimerais tenir cette histoire et accepter que ça fait partie de moi, que ça m’a construite dans ces trois lettres que font le moi et que ne serait-ce que par cette composition qui parvient à tenir encore debout après tout ce temps, ça fait une belle personne. Me réparer d’une histoire qui a eu l’impact lourd de casser quelque chose ; me réparer avec la beauté de cette capacité d’aller à présent de l’avant.
Alors oui je continuerai de voir mes cicatrices. Je continuerai de voir tout ce que ces cernes trahissent alors que d’autres en font une glorification romantique du mystère. Je comprendrai pourquoi l’éclat de l’oeil n’est pas si intense, pourquoi la paupière porte ce pli et retombe, pourquoi ce regard s’exprime maladroitement. Je continue de les voir, je les assimile, je les accepte à présent comme part constituante bien que ô combien difficilement acceptable comme tout passif, et d’elles je reforme une entité plus solide. Un être qui parvient à se remodeler pour continuer d’exister.
Il y a pleins de moyens pour symboliser une idée semblable, en tout cas pour la thématique de la cassure, de la fragmentation. Si d’ailleurs de nouveaux autoportraits se font un jour, c’est sans doute autour de cette vision là que je travaillerai pour l’exploiter jusqu’à satisfaction.

Crazyexgirlfriend Trash GIF - Crazyexgirlfriend Trash ...
Pour résumer : quand tu te vois comme ça mais que t’essaies d’embellir ta vision, comme dans ce gif de la chanson « sexy french depression » dans Crazy ex-girlfriend. 

Le processus de création.


Game Of Thrones The T GIF - Find & Share on GIPHY
plus moyen d’esquiver, alleeeeer. 

Puisqu’il y avait cette démarche de plier ce travail sous un prisme, il y avait besoin que le support de base y réponde plus ou moins, en usant d’une petite « tricherie » pour que de moi à moi, ce soit moins dur de me dire que… j’allais sérieusement consacrer plusieurs heures sur ma tête. Donc pour répondre à ce besoin, il était hors de question pour moi d’opter pour un selfie tout simple pris un jour où l’estime de soi est meilleure, ni de choisir une photo prise par une amie. L’idée de faire du modèle vivant en ayant juste un miroir face à moi pour me refléter m’intrigue beaucoup, mais je savais que j’allais plus rapidement m’énerver à cause du mouvement qui ne me permettrait pas de représenter quelque chose de fixe, d’identique, puis c’est toute une contrainte de luminosité, de même placement quand on reprend un autre jour, c’était trop pour un début. La photo restait donc la meilleure solution, la seule qui se présentait à moi, mais en y rajoutant… la mise en scène.
Ok tu te vois cassée et tu souhaites être réparée, surtout te réparer, mais comment finalement ? Tu veux te voir comment ? Refléter quoi ? Une tristesse face à ton image ? La peur de ce que tu peux dégager ? La concentration du travail à fournir ? La joie de te voir une à nouveau ?
Et rien de bien sorcier pour cela, franchement. Il m’a suffit de jouer du pinceau près du visage, prétendant à une sorte de parodie du maquillage avec un pinceau à peinture le temps d’un cliché. Peut-être un peu de peur dans le regard (parce que je crois que j’ai souvent peur en temps normal, alors face à mon image n’en parlons pas, ça correspondait plutôt bien) La difficulté pour moi là-dedans a certes été de me mettre d’accord sur le fait que j’allais garder telle photo sur les quelques unes prises (à entendre, la moins pire, comme d’hab) mais surtout d’en profiter pour me voir… sans mes binocles.
Ca fait un moment que je les ai celles-là, et elles ont encore par moment le rôle de me cacher ( attention, c’est bien des lunettes de vues et pas des accessoires hein, je vois rien sans. ) ; surtout qu’un visage change radicalement avec ou sans ses lunettes, et plus d’une fois on me l’a dit. Et franchement, le mien sans lunettes, ce sont mes cernes soudainement accessibles, c’est un autre regard égaré, c’est pleins d’autres trucs que je tolère pas toujours si bien. On m’a déjà demandée pourquoi je ne mettais pas des lentilles, et en plus de l’irritation que ça doit être pour la rétine, y’a le fait simple que 1) j’adore les lunettes, et 2) j’aime (mieux) mon visage quand il en revêt. Point barre. Mais vu qu’à la fin il y aurait des striées dorées sur le visage, les lunettes étaient une gêne. Puis bon, dans cette idée d’être toute pétée, ne pas avoir mes lunettes c’est être à nue pour moi.

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ça fait bizarre un close-up de sa face, vraiment. 

En soit, ça n’a pas été si compliqué que ça de faire cet autoportrait, étonnamment. Je pense vraiment que m’être mise en scène m’a apportée un détachement pour ne pas juste « me dessiner moi », mais fixer le message que je voulais. Le plus difficile dans la réalisation a été l’outline, l’étape où il n’y a que les lignes servant de base. Ca, c’est une étape terrible en fait, même quand je fais le portrait de quelqu’un d’autre pour la simple raison que ça ne ressemble rien. Prenez une photo de la personne de votre choix et décalquez la. Vous allez faire la forme du visage, les yeux, la forme du nez, la bouche, la silhouette des cheveux. Ok, génial, mais c’est dégueu, y’a aucune profondeur, vous ne reconnaissez pas la personne, vous ne savez absolument pas à quoi ça va aboutir à ce moment là et c’est frustrant.
Déjà, en soit, le dessin, c’est frustrant : tu as un espace vierge dont tu fais entièrement quelque chose sans trop savoir si ça va ressembler à l’image que tu as dans ta tête. Mais à ce moment là quand on se frotte au portrait, vous avez l’impression d’avoir une immensité pas possible qui flanque la trouille. Comment je fais pour lui donner de la matière, à ce prétendu visage qui est plutôt un masque en papier là ? Bien entendu, ce qui se cache derrière, c’est les multiples essais et la technique acquise, mais j’ai toujours ce moment de crainte en me disant « je commence par où ? », à devoir sculpter de la 2D finalement pour la transformer en 3D. Enfin bref.
Sur cette étape du dessin, il me faut mettre un GIGA WARNING ! Quand on a des troubles dissociatifs, franchement, je pense que c’est très très compliqué de relativiser avec cet exercice, notamment arrivé là. On ne se reconnaît pas, ce qui à ce point du travail (le plus rapide) est normal. Mais même à la fin, bien que c’est un dessin de nous qui n’est pas forcément 100% identique non plus, ça fait bizarre de se retrouver d’un coup… face à soi. Qui nous regarde. J’ai quelques soucis de cet ordre là ces derniers temps ( rien de sérieux, je pense, j’espère ) et ça m’a vraiment mise mal à l’aise personnellement, donc je préfère prévenir pour des personnes qui ont des troubles dissociatifs plus importants.

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J’ai oublié de prendre juste l’outiline en photo, mais rien que cette étape sans les lèvres est hyper creepy. (dieu que le graphite est mal appliqué… pardon)

Après en vérité… La construction de l’autoportrait est comme un portrait quoi. C’est juste être sur son visage qui est bizarre, et pour contrer cela je me concentrais en « zoomant » sur des parties et en travaillant rarement sur l’ensemble. En fait, ce travail je l’ai plutôt fait au début en m’assurant d’une répartition unie de graphite sur tout le visage pour faire la peau. Ensuite, travailler au cas par cas les zones pour leurs apporter la profondeur nécessaire qui ne nécessite pas de tout reprendre, et en focus élément du visage par élément du visage. Habituellement j’utilise une petite serviette en papier recyclée de sa non-utilisation lors d’un passage en salon de thé que je cale sous ma main quand je dessine pour éviter de faire des étalages dégoûtants de crayon lors du déplacement de la main ou des gestes répétitifs du poignet quand on griffonne, d’avoir des zones toutes floues et sales. Pour le coup, j’ai préféré opter pour une feuille A4 qui barrait l’essentiel du visage histoire de pas m’avoir en horreur. L’autre tips aussi, c’est d’écouter quelque chose en même temps : pas de la musique qui laisse l’esprit vagabond mais plutôt podcast ou livre audio, qui emploi l’attention du cerveau pour éviter que les pensées néfastes ne tournicotent pendant la création.

Comme je suis une fada du mixed media, je n’allais pas faire que du crayon, et j’ai choisi de l’encre de chine pour… des éléments que j’avais la flemme de dessiner, en fait. Enfin, la monture des lunettes histoire de nuancer avec la grosse couche de graphite qui fait les cheveux. Parce qu’une fois qu’on a foutu du 5B et bien poncé la mine, j’admets que je n’étais pas certaine de réussir à foncer plus avec les crayons que j’avais, donc le support noir profond était idéal. Après, ça a été le vêtement. Déjà parce qu’il n’avait AUCUNE importance, puis ce côté effacé en bas me plaisait beaucoup et allait avec l’ambiance que je donnais au dessin, donc mon pinceau à réservoir a été mon meilleur ami pour avoir la diffusion d’encre suffisante en haut et faire avec du plus sec en bas.
Et là revient un autre point dur. L’application de la peinture acrylique dorée. Bon déjà parce qu’au départ, je voulais à tout prix du relief, que la peinture sèche en volume, mais j’ai loupé mon coup (y’a une technique pour ça ? I dunno) et du coup les traits sont bien plus épais que ce que j’espérais, ce qui m’a pas mal chiffonnée. Et puis c’était aussi travailler sur visage entier, avec le perfectionnisme qui se réveille et qui te crie fort que ça ressemble plus à rien, tu les as pas ces fichus traits sur la trombine, c’est pas « réaliste », c’est pas ceci, c’est pas cela, et blablabla. Et là tu t’insurges d’un auto « ta gueule » à ton esprit. Puis j’ai aussi la frustration / énervement face à ce pinceau, ça se voit que j’utilise jamais de la peinture parce que j’ai eu du mal à l’étaler sans déborder comme une enfant, mais bon c’est pas l’élément central alors j’essaie de me rassurer comme je peux. Y’a aussi eu des bavures de peinture sur la main, mais c’est plus fidèle en fait : je m’en mets partout quand je dessine ! Incapable de garder les mains propres dès que je touche à de l’encre ou de la peinture.

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la texture du trop gros close-up est pas top, mais la texture de la peinture dorée. ♥

Une des réelles difficultés qu’il y a eu, ça a été le temps. Je pense que dans le futur, il faudra que je vois pour maximum travailler ça sur trois jours pour quelque chose de ce genre en tout cas. (j’entends dessiner le visage entier) J’ai peut-être dû étaler ça sur cinq jours, pour ne pas en faire trop sur 24h et saturer mais… J’ai saturé dans la durée, ça m’agaçait de travailler à « ça » plusieurs jours. J’avais l’impression de ne pas être productive sur plus de choses qui en valaient la peine. Clairement, passé 3 jours de travail (je n’ai pas fais gaffe au nombre d’heures que j’y passais, je ne faisais pas ça de toute ma journée rassurez-vous) je n’avais plus qu’une envie, en venir à bout. D’où aussi l’intérêt d’employer divers médiums pour un goût de renouveau à la tâche, et notamment des médiums rapides comme un bon gros aplat d’encre, comme ça c’est fait et on parle plus.

Je ne sais pas si ça m’a apportée quelque chose. Sur le coup oui parce que j’ai découvert qu’en fait je n’avais jamais vraiment pris la peine de me voir. Forcément j’ai eu les questionnements type « pourquoi t’aimes pas ça chez toi ? Pourquoi ça bloque tant ? » et même si je sais que c’est du manque de confiance et un reste de remarques passées, c’est qu’il y a aussi un conditionnement à ne pas s’aimer. Ca nous paraît limite pas normal de cohabiter avec notre tête sans rien lui reprocher. D’ailleurs, c’est la guerre du « soit on ne s’aime pas, soit on s’aime », si j’arrive au deuxième je serais bien contente, mais j’en demande pas tant, juste de la neutralité sur un physique, c’est suffisant. (oui j’en ai ras la casquette des messages qui enjoignent à absolument s’aimer) C’est pas que je vais me mirer dans le miroir maintenant, non. Je ne pense pas en fait que ça m’ait apporté vraiment quelque chose outre un exercice intéressant pour sortir de ma zone de confort. Comme on sait pas trop pourquoi on fait des selfies, bah j’ai fais un autoportrait. Quelques 2000 mots si ce n’est plus d’écrits pour venir à cette conclusion. Super hein ?

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keukou c mwa (ça fait bizarre oh ma gad) (jeveuxmecachermaintenant)
Brainstorming non-exhaustif, ou quelques idées pour se frotter de manière créatif à l’autoportrait.

Peut-être que c’est une pratique qui peut t’intéresser bien que le portrait ne soit pas ta spécialité, que tu estimes ne pas savoir dessiner, ou que tu maîtrises tout ça mais que tu cherches une approche originale pour parer l’aspect académique. Je ne compte pas l’univers de la photographie dedans, déso, mais voilà quelques idées :

自撮り写真を半分マンガにする「#ToonMeChallenge」が世界中のイラストレーターの間で大流行 ...
source : danshihack.com (j’ai juste googlé toonme challenge, pas sûre du droit d’images, clairement)

Dernièrement, il y a eu un challenge qui a fonctionné du feu de dieu qui est le #toonme. En gros, tu prends un selfie, et tu dessines une partie de la photo avec ton style. Il y a de très très chouettes résultats, et pour beaucoup je pense que ça a été une première approche de l’autoportrait donc pourquoi ne pas commencer par là ? Perso je ne l’ai pas fais, comme je travaille en tradi, et que je n’ai pas d’imprimante avec ni de photo sous la main à travailler.

Pourquoi pas travailler entre l’esquisse et le réalisme ? Je m’explique : si c’est un travail trop colossal, ou juste pour obtenir une esthétique, pourquoi pas travailler sur certaines parties l’esquisse en hachurant pour les zones d’ombres, en laissant les traits courts et fouillis qui se chevauchent apparents ; et sur d’autres espaces du visage, réaliser la version aboutie. Je ne sais pas si au graphite le résultat serait super super, mais en optant pour un autre médium, comme par exemple l’aquarelle pour les parties « propres », la démarcation peut vraiment apporter l’intérêt du dessin. Ou même, si on ne touche que le crayon et que comme moi vous maîtrisé surtout le crayon à papier, hé bien garder celui-ci pour faire les zones finales, et croquer le reste avec un crayon de couleur peut être l’alternative.

Collage Illustrations 3 , Ricky Lin, source Behance

Et j’en viens au mixed media ! Je ne dirais jamais assez combien je peux aimer varier les médiums sur un même dessin car la variété des textures enrichie vraiment une création. Et ça, hé bien on le retrouve dans les deux premiers points. Avec le toonme, c’est souvent la photo et le digital. Pour la deuxième idée, je conseille plutôt deux médiums. Pourquoi pas mélanger le crayon au collage et à des coups de peinture ou d’encre pour des zones plus grossières ? Pourquoi pas faire certains espaces découpés, que ce soit pour faire des motifs, une sorte de dentelle en papercut par exemple ? Pourquoi pas apporter seulement quelques zones de couleurs sur du noir et blanc avec une craie grasse ? Les possibilités sont vraiment multiples comme ça !
Vous ne démordrez pas sur le fait que vous ne savez pas dessiner ? Ok. Décalquez alors les traits principaux de votre visage et reportez ça sur une feuille. Vous pouvez peut-être essayer une superposition de tracés en utilisant plusieurs couleurs, comme pour faire un effet RGB par exemple qui a pas mal la côte? Ou alors pour apporter une sorte de mouvement ?

Calligraphy, portrait, par Vlada Shamova. Source behance

Sur le même système, une fois les traits reportés, pourquoi pas prendre un texte de votre choix ou alors écrire ce que vous voulez sur vous même pour former un autoportrait en calligrammes ?
Pas envie de faire un autoportrait entier ? Ok, fragmentez. Faites seulement des petites capsules de votre visage, comme des minis miroirs qui ne reflètent qu’une partie. Que ce soit sur une feuille où vous disposez multiples gabarit pour dessiner ici une oreille, là un œil, etc ; que ce soit correctement placé et proportionné ou alors totalement mélangé pour donner un côté abstrait ; ou encore que ce soit un œil fait sur un bout de bois, un autre sur un emballage et qu’ensuite ça vous fasse une installation originale, tentez le coup, en plus ça vous fera découvrir des supports !

Jean-Charles de Castelbajac: Phantoms of Eden | NOWNESS
Ca par exemple, c’est le style du dit Castelbajac, c’est pour l’utilisation des couleurs surtout que je le place. Source : nowness.com

Ca aurait été plus rigoureux de le mettre dans les premières suggestions parce que c’est un peu moins complexe peut-être, mais simplement : essayez certains style graphiques. Pourquoi pas réaliser un autoportrait tout en angle ? Façon cubistes ? Avec seulement des formes géométriques ? Ce qui revient à vous mettre des contraintes comme utiliser les couleurs primaires comme le fait le styliste Jean-Charles de Castelbajac ? Ou encore plus dur, une seule couleur en travaillant ses nuances ?


Voilà ! Je crois que déjà, juste en faisant mouliner ma petite caboche, j’ai réussis à dégoter une bonne liste qui vaut ce qu’elle vaut évidemment, mais peut-être que vous n’aviez pas envisagé l’infini des possibilités de réalisations. Bien entendu, cela ne tient pas qu’à l’autoportrait mais à tout type de dessin, parce qu’il n’y a pas une manière unique de faire les choses.

source
bibi paniquée à l’idée de publier cet article surchargé de gifs pour qu’il soit pas chiant à lire et effrayée de lire des retours

Bien que ce fût long, j’espère n’avoir pas trop été répétitive et que j’aurais su vous intéresser avec ce bilan d’expérimentation. Est-ce que, si vous n’avez pas déjà essayé, vous auriez envie de relever le challenge ?

10 réponses sur « Cultiver sa créativité #1 : l’art de l’autoportrait. »

  1. L'ourse bibliophile

    WAAAH ! Il rend trop bien ce portrait ! ♥ Je me suis retenue de scroller l’article pour voir s’il y avait une photo du résultat final (tu m’as bien fait languir parce que j’ai tout lu !)), mais franchement, c’est top ! Comme tu le dis, le gros plan sur la peinture dorée n’est pas forcément très beau alors que ça rend vraiment bien quand on voit le tout ensemble. J’aime beaucoup le mélange crayon, peinture, encre, ça fait des contrastes très chouettes. (Tu as bien fait pour les lunettes, ça rend très bien ainsi ! (c’est peut-être nul, mais juste les reflets, ça suffit déjà à me scier !)) J’aime bien, on dirait que
    Désolée, je n’ai pas grand-chose de bien constructif à te dire, mais j’ai adoré lire tes réflexions sur le sujet, suivre la progression face aux différentes étapes du dessin et découvrir tes différentes suggestions en fin d’article (il y a des idées super chouettes et je suis souvent fascinée par les rendus (perso, je tente, ça ressemblerait juste à un gros pâté !)).
    En tout cas, félicitations ! Voilà une excursion hors de ta zone de confort bien réussie !

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    • La Récolteuse

      Aaaaaah, merci beaucoup, ça me fait trop plaisir !
      Haha, c’était le but, le mettre le plus tard possible on va dire.
      Faut dire que le gros plan est pas d’une super qualité, puis ça assombri le doré. Outre pour la texture, je ne sais même pas trop pourquoi je l’ai prise cette photo, mais bon, peut-être pour « décorer mon blabla » haha.
      Ca me fait trop plaisir, vraiment, que ces reflets soient relevés ! J’ai eu l’impression qu’on ne les voyait pas tant que ça, ou en tout cas comme c’est considéré comme « détail » ce n’est pas ce sur quoi les gens s’arrêtent le plus or, c’est là-dedans qu’on obtient le plus de réalisme.
      Je crois que tu as oublié de finir ta phrase, ou alors d’enlever un bout, je ne sais pas, en tout cas ça me rend curieuse. « J’aime bien, on dirait que »… que quoiiiii ? (comment je te presse, oupsi)
      Encore merci, vraiment ! Je n’avais pas l’impression que cet article était très intéressant à lire honnêtement, je crois que c’est rébarbatif pour beaucoup.. M’enfin !
      Mais ne dit pas çaaaa ! Toutes les suggestions ne sont pas forcément super évidentes, mais au moins la tentative d’un calligramme peut être accessible à tou.te.s même si oui tu ne reconnaîtras sans doute pas ton visage mais qu’importe, est-ce toujours ça un autoportrait vu comment certains peuvent être déconstruits ?

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      • L'ourse bibliophile

        (Sérieux, je suis tellement navrée d’être la seule à avoir commenté cet article qui a dû te demander un temps fou… Tu mériterais mieux que moi. EH LES GENS ! VENEZ VOIR PAR LÀ ! Y a des trucs trop chouette dans le coin !)
        J’avoue, à la photo du doré, je me suis dit « aïe, qu’est-ce que ça va donner, le dessin au crayon avait l’air tellement réussi, j’espère que ça ne gâche pas tout » (suspense, la fille à fond dedans, l’estomac noué à l’idée que ça nuise à ton dessin), et finalement pas du tout, c’était une super idée ! *admiration totale*
        Ahah, je suis contente si j’ai réussi à relever quelque chose d’important mine de rien ! Je trouve qu’on les voit juste assez pour qu’ils semblent réalistes ; plus marqués, ça aurait fait « eh, regardez-nous, on est là, vous avez vu comme on est bien fait comme reflets ? ». Là, c’est juste « on est là, on est transparent mais on reflète un peu la lumière, normal ».
        Ah, mince pour la phrase ! Je ne sais plus ce que je voulais dire… c’est bête, hein ?… Non, je crois que j’allais dire que ça m’avait sourire parce que tes yeux ont un regard un peu étonné, comme si ton portrait se disait « merde, qu’est-ce que je fais là ? » ou « mince, je suis face à face avec moi-même, c’est bizarre, c’t’affaire… ». Bref, c’est bête, mais c’est l’effet que ça me fait. (Faut que j’arrête de faire parler des bouts de dessin, moi…)
        Ecoute, on verra bien. Peut-être qu’un jour j’essayerai juste pour m’amuser et voir ce que ça donne !

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      • La Récolteuse

        Oulala ne t’en fais pas ! En vérité, cet autoportrait a eu plutôt du succès mais sur instagram (ce qui m’a étonnée, à vrai dire, m’enfin, après c’était plutôt des connaissances qui l’ont commenté, peut-être parce que c’est plus « familier » parce que « ma tête » et que sur les RS on poste plus facilement des selfies ? Je n’en sais rien, m’enfiiin) Mais j’admets que fasse à des articles aussi longs, et de plusieurs heures (en même temps, mon talent ça, si j’écrivais moins…) ça décourage facilement de ne pas avoir de retour, donc merci à toi ! Tu es vraiment trop mimi haha.
        Ca c’est un vrai soucis que j’ai en ce moment comme j’use toujours du crayon pour les visages, mais que je fais pleins de mélange de médias, j’ai toujours peur que ça ne rende pas super ! Et j’ai eu la même crainte avec les traits dorés, donc finalement tu vois cette photo moche permet de se poser le même questionnement que j’ai eu haha. Ton emballement me fait tellement plaisir à lire, sérieusement !
        Mais continue à faire parler des bouts de dessin, ça m’éclate de lire tes trouvailles haha. En effet, ces reflets auraient accaparé toute l’attention, naméoh, ça fonctionne pas comme ça les cocos ! (même si un reflet sur des binocles, en vrai.. tu vois que ça parfois) Pour le regard, c’est complètement ça franchement ! Y a pas mal ma peur de me retrouver face à moi là-dedans, et mon propre étonnement d’avoir pris le temps de dessiner ma trogne… C’est vraiment déroutant.
        Un jour si tu t’ennuies, ça peut être l’occase (mais vu tout ce que tu as d’occupation, vas-tu t’ennuyer un jour haha)

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      • L'ourse bibliophile

        Oui, c’est ce que j’ai vu hier soir (vu que j’ai enfin pensé à faire un tour sur instagram), c’est déjà ça, mais ton article aussi est intéressant, je trouve !
        Je comprends totalement ta crainte. A mon petit niveau, quand j’arrive à dessiner un truc dont je suis assez contente, il y arrive toujours un moment où je me dis « est-ce que je continue ? est-ce que je mets en couleur ? est-ce que je devrais accentuer ci ou ça ? » et où j’ai trop peur que ça gâche tout ! Sauf que vu que c’est un exploit quand j’arrive à un truc correct, je ne peux même pas me dire qu’au pire je n’aurais qu’à recommencer vu qu’il y a assez peu de chance pour que je sois contente de moi deux fois de suite sur le même dessin.
        Oui, effectivement, un reflet peut être archi visible, mais vu que le sujet ici n’est pas ta paire de lunettes mais ton visage, je trouve ça parfait que les reflets soient là mais discrètement.
        En tout cas, c’est vraiment trop bien ! Encore bravo, ça valait le coup d’essayer !

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      • La Récolteuse

        Toi qui craignait d’y passer peut-être trop de temps haha, je dirais que ça va, tu es loiiiin de l’addiction ! En tout cas, merci beaucoup, ça me fait sincèrement plaisir.
        Alala je compatis, j’ai ce soucis à chaque fois également ! (et puis, je trouve qu’en prime, y a toujours un truc qui gâche au bout d’un moment, et je me dis « rah je le savais j’aurais jamais dû rajouter ça / faire ça comme ça ! » et la panique recommence à chaque dessin. Nul.) En prime, recommencer un dessin, c’est vraiment la galère. Tu pars pas dans un bon état d’esprit faut avouer, puisque tu as la peur de refaire un truc que tu estime nul.

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